Forum › Récits de courses › Ardéchoise 2016
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22/06/2016 à 11:52
Je me lance pour mon premier CR en temps que membre de la Rushteam (attention, roman !! Clin d'oeil à Vincent dont j'avais adoré son CR Ironmédoc).
M'étant inscrit au club en décembre 2015 après une première séance de natation dans la petite piscine du Pontet, j'ai rapidement compris qu'un des RDV important de la saison (avec Porrentruy et le TDFO) était le triathlon de Préverenges. En regardant les dates de ce triathlon, je me rends compte qu'il tombe le même week-end que MON objectif de la saison : l'ardéchoise. L'ardéchoise qu'est ce que c'est ? Un des plus gros rassemblement de cyclistes d'Europe (près de 17000 inscrits cette année), des dizaines de parcours pour découvrir l'Ardèche en vélo et en point d'orgue les 5 courses du Samedi dont l'Ardéchoise : 220 km avec 4270 m de dénivelé positif pour 10 ascensions.
Je n'ai pas vraiment fait de préparation spécifique mais ai essayé d'être assidu aux entraînements du club et notamment aux belles sorties du mardi. Aussi, j'ai essayé de mettre à profit mes trajets aller – retour boulot pour faire un peu de vélo. Partant quand même dans l'inconnu, je mise beaucoup sur l'expérience de mon beau père (Xavier) – 4 ardéchoises à son compteur – sur qui je compte bien calquer ma course.
Le jour J, la météo s'annonce capricieuse même s'il ne pleut pas sur la ligne de départ. Elle s’avérera plus que dantesque au final ! Et l'on peut déjà lire l'appréhension sur le visage des près de 9000 coureurs qui vont s’éparpiller sur l'un des 5 parcours de la journée. Arrivée tôt avec Xavier nous partirons à 7h40 dans le deuxième bloc de 500, après les quelques fadas partis à 7h pour 278 kms et 5370m de D+.
Dès le coup de canon, le rythme est soutenu. Et malheureusement, nous devons déjà enfiler le kway au km 5 … Le col de Buisson, première difficulté de la journée, est un bon faux plat montant sur une quinzaine de kilomètres. Il est avalé à près de 28 km/h de moyenne par notre groupe. S'en suit une belle descente technique vers Lamastre, rendue humide par la pluie qui s'est arrêtée (pour l'instant …). A la sortie de la ville, connue pour son petit train à vapeur touristique, nous commençons l'ascension vers Nonières, nouvelle difficulté relativement longue (environ 10 kms) mais peu pentue (300m de dénivelé). Ce col est encore une fois avalée à la vitesse grand V. Nous basculons alors sur une descente relativement facile et presque sèche vers Le Cheylard. Une fois la ville traversée, j'effectue mon premier arrêt "technique". Sur le bord de la route après quelques 50 kms, je prends seulement conscience de la quantité de cyclistes partageant la chaussée. Je me fais alors dépasser par une file continue de plusieurs centaines de personnes. Je remonte sur mon vélo et reprends ma place dans l'immense peloton avec l'idée d'essayer de rapidement rejoindre Xavier, sans toutefois me mettre dans le rouge. Après 10 bonnes minutes de chasse par la gauche de la masse, je le retrouve, bien calé dans les roues de compatriotes belges ! Nous sommes alors au coeur de la 3ième difficulté, le col de Mézillac toujours plus long (+ de 22 kms) mais toujours très peu pentu (3%). Lors de cette montée, le rythme se calme quelque peu et la vitesse tombe (enfin) en dessous de 25 km/h permettant de souffler un peu.
Au sommet, la commune de Mézillac marque la bifurcation entre mon parcours et le parcours de 180 kms. Aussi, ce charmant village typiquement ardéchois accueille le premier ravitaillement officiel. C'est l'occasion de déguster quelques rondelles de saucisson et autres fromages locaux. Il reste alors 150 kms. Arrêté devant le beau buffet, je remarque que Xavier ne s'arrête pas et me fait signe qu'il continue. Ni une ni deux, je remonte sur ma bécane pour attaquer la descente, bien plus pentue que la montée. Le ciel est gris mais la route bien que bosselée est relativement sèche. Le nombre de cyclistes a maintenant bien diminué. Je fais la descente accompagné d'un local dont les trajectoires sont très propres et me cale dans sa roue pour en profiter. J'ai alors bon espoir de revenir rapidement sur mon beau père. En bas, ça remonte directement sur les cols de l'Aizac et Moucheyres. Deux ascensions courtes (3 kms chacune) mais légèrement plus sèches (7 et 6 %). J'attaque à un rythme assez soutenu et avale les deux bosses en doublant sans discontinuité et sans me faire dépasser. Je ne me ferais d'ailleurs plus doubler en montée jusqu'à l'arrivée, preuve que les jambes, lourdes au départ, tournent très bien. Par contre, toujours pas de traces de Xavier. Je commence à croire qu'il a bifurqué sur le parcours de 180 kms … J'apprendrais à l'arrivée que nous ne nous sommes pas compris au ravito et qu'il abandonnera au kilomètre 125, littéralement congelé. Entre temps, la pluie a repris … Doucement d'abord puis de plus en plus fort au cours de la descente vers Burzet ce qui la rend d'autant plus dangereuse.
La sortie de Burzet, ville désertée à cause d'une météo plus que défavorable, marque le pied de la principale difficulté de la journée : l’enchaînement du col de Barricaude (13 kms à 5,5%) et du col du Gerbier de Jonc, source de la Loire (12 kms à 3,5%), sans descente entre les deux. Je commence Barricaude à un bon rythme de 17-18 km/h, en continuant de doubler puis fini par me caler à 16 km/h dans un groupe de 3 dont l'allure est particulièrement régulière. La pluie se transforme peu à peu en déluge et finit de nous détremper. Arrivée à Barricaude, je profite d'un ravitaillement pour prendre un premier thé et manger un sandwich et une banane avant de continuer vers le fameux Gerbier de Jonc … que l'on ne voit pas !!! Caché par de gros nuages beaucoup trop noirs pour annoncer le retour d'un temps plus acceptable. Nous venons de franchir la barre des 120 kms, il en reste donc "tout juste" 100 … Je repars avec l'estomac plein mais le moral bien entamé par cette réflexion, par la pluie et le froid. On annonce 4°C au sommet du Gerbier de Jonc, point culminant de la course avec ses 1417 m. La montée se déroule plutôt bien. Je tâche de tourner relativement vite les jambes pour tenter de me réchauffer mais rien n'y fait. La descente vers Saint-Martin de Valamas est plus que pénible et monstrueusement dangereuse. Nous avons même droit à une averse de grêle ! A ce moment de la course, les muscles qui me font le plus souffrir sont ceux de la mâchoire dont je ne peux stopper le claquement.
Le ravitaillement d'Arcens au pied du col est pour moi salvateur. Je m'y arrête une bonne demi-heure pour me réchauffer et englouti banane, fromages, saucissons et surtout des grandes verres de thé et de café. Deux très bonnes actions lors de cet arrêt : enlever mes gants trempés et les ranger définitivement, cela me permettra de retrouver un semblant de sensation dans les doigts pendant les descentes, puis retirer temporairement mes chaussettes pour les essorer et me masser les doigts de pied pour en retrouver la mobilité. Quelque peu requinqué, je constate que tout le monde est trop peu couvert pour de telles conditions et donc dans un état souvent pire que le mien : certains grelottent sous des couvertures de survie, d'autres sont directement pris en charge par les secours. On apprendra à l'arrivée que près de 40% des partants du jour ont abandonné en cours de route et que les pompiers mobilisés pour l'occasion ont effectué plus de 200 interventions pour des débuts d'hypothermie … Inutile de dire que la route et ses bas côtés ressemblent plus à un champ de bataille qu'au théâtre d'une cyclo-sportive ! Il me reste alors 3 ascensions.
Je rassemble le peu d'entrain qu'il me reste et repars seul dans un faux plat descendant menant à Saint-Martin de Valamas. Ce village marque le pied des cols de Clavière et Freydaparet qui s’enchaînent sur 20 kms assez roulant à 3,5% de moyenne. Malgré la pluie toujours battante, je continue de doubler du monde (on retrouve peu à peu les cyclistes partis sur de plus petites boucles). Je me surprends à maintenir une belle allure autour de 20 km/h ! Le moral remonte en même temps que la pente ! Au sommet par contre, je dois affronter une nouvelle descente sous la pluie qui ne veut décidément pas s'arrêter, elle se passera aussi bien que possible dans ses conditions, et surtout, je passe devant le panneau "Arrivée à 50 kms". Gros coup de massue qui me fait verser quelques larmes … J'essaie de me regrouper, appuie de plus belle sur les pédales et me lance dans la courte ascension du col de Rochepaule (4 kms à 5%). Le rythme est bon, il me reste encore un peu de jus et une nouvelle fois, le moral remonte ! Je saute le ravitaillement du sommet pour essayer de rallier l'arrivée au plus vite. Il reste alors une trentaine de kilomètres. Je suis bien concentré lors de la courte descente et attaque le dernier col, celui de Lalouvesc (9 kms à 5%).
Le pied, assez pentu sur 4 kms, est escaladé à un rythme de sénateur sur la plus petite vitesse pour ne pas exploser si proche de l'arrivée. La seconde partie, beaucoup plus roulante, me permet de repasser le grand plateau et de me lancer dans le long faux plat qui nous ramène enfin vers Saint-Félicien. Première surprise, la pluie s'est calmée et s'arrête même à quelques kilomètres de l'arrivée. Je retrouve un grand sourire qui ne quittera plus mon visage ! Seconde surprise, je me fais enfin doubler par quelqu'un qui fait la descente à tombeau ouvert. Je prends sa roue et tente de me calquer sur ses trajectoires. Troisième surprise, nous nous faisons reprendre par 2 acrobates allant encore plus vite que nous ! Nous finirons ensemble et le compteur ne redescendra plus en dessous de 45 km/h ! Cela m'a fortement fait penser aux derniers kilomètres nous ramenant sur Porrentruy lors du stage de Pâques ! Sur les trois derniers kilomètres, complètement plats, nous jouons d'ailleurs au chat et la souris. A ce petit jeu la, c'est moi qui remporta la timbale dans notre petit groupe de 4, rapidement félicité par mon second qui vient mourir dans ma roue sur la ligne. Ça y est, c'est fait ! Je peux même enlever mon kway puisqu'un rayon de soleil pointe enfin le bout de son nez : le premier de la journée. Il était temps ! Il est alors 16h30. J'aurais avalé les 220 km en un peu plus de 8h53 soit près de 25 km/h de moyenne !
Pour la petite histoire, je finis 74 / 559 et suis bien fier d'avoir terminer une telle épreuve dans de telles conditions. Je suis d'autant plus content que je me rapproche peu à peu de mon niveau de vélo de l'année dernière, bon signe pour les triathlons du mois d'Août ! J'attends maintenant avec impatience le récit du défi de Gianna et de sa Marmotte ! En espérant que les conditions soient un peu plus estivales que celles que j'ai pu avoir !
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22/06/2016 à 17:58
Magnifique récit et sacrée performance dans le froid!! Quel moral pour ne pas abandonner et franchir la ligne avec le grand sourir
Mon oncle a bouclé 500km en 3 jours lors de cette Ardéchoise. Il m'a raconté qu'un de ses compagnons à fini à l'hôpital en hypothermie avancée.
Bonne récup et profite du soleil pour décongeler tes orteils
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