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27/04/2010 à 14:12
Salut à tous,
Cela faisait un bon moment que j’attendais le jour J, le voici donc qui pointe le bout de son nez en ce samedi 24 avril 2010 pour une nouvelle édition de la Patrouille des Glaciers.
Après environ 6 mois de préparation, 38’000 mètres de dénivelé positif avalé, 4 courses de préparation, un séjour en haute altitude de 4 jours et quelques bonnes cloques, le départ pour Arolla sonnait ce midi du vendredi 23 avril.
Rendez-vous donc était donné à 12h45 à la gare de Lausanne ou plusieurs patrouilleurs munis de leur ski et barda attendaient sur le quai malgré un soleil et une température qui aurait fait fuir toute personne normalement constituée, drôle d’idée que se balader avec des skis en cette saison, non ?
Embarquement pour Sion donc, avec mon ordre de marche (ben oui pour une fois que l’armée sert réellement à quelque chose d’utile) et mes deux compagnons de cordée. De là le service de bus postal nous a amener à Evolènes pour une séance de contrôle matériel digne de l’école de recrue, que de souvenirs…, il faut tout de même préciser que l’organisation de cette course en sans failles du début jusqu’à la fin.
Contrôle de la carte d’identité, étiquetage des skis et bâtons, contrôle de la corde au mm, dépliage de la corde, plombage des chaussures, vérification DVA/pelle/sonde avalanche/boussole/pharmacie/gants/frontale/cagoule/piolet/c asque/lunettes/etc… Après deux heures de queues, de vérifications et consort on nous oriente enfin sur notre logement et là surprise de taille directement sur Arolla et son plus belle hôtel.
On reprend donc le bus postal en direction Arolla à l’Hôtel Kurhaus, une super chambre à trois nous attend ce qui a tout pour mettre du baume au cœur pour l’avant course, et nous motive encore plus que le fait de dormir dans un dortoir de 60 personnes avec des odeurs et des bruits divers, franchement ce n’est pas ce qu’il y a de plus reposant pour l’esprit.
Nous attaquons ensuite la préparation technique des sacs, prendre le moins de choses possibles, s’alléger un maximum corde en carbone, gourdes carbone, gants carbone, veste carbone, aliments en carbone, bref que du carbone afin de porter un minimum de matériel
pas évident de caser tout ce matos dans un petit sac, mais on ne sait jamais ce que nous réserve sœur la montagne dans une course ! Quand tout cela fût fait une bonne séance de marche de 20 minutes jusqu’à la tente militaire nous attendait de quoi s’acclimater avant la course et le repas du soir servi par la Migros. Et quel repas, j’étais plombé pour le restant de la soirée, nous fûmes nourris comme de vrais sportifs mais la qualité du repas était exceptionnelle. Après un repas magnifique, des concerts de cor de chasse, un garde à vous sous l’hymne national Suisse et une prière patriotique il était temps pour nous de regagner nos pénates et de se reposer un peu avant la diane du lendemain fixée à 01h30 du matin.
Et le réveil fût dur, les yeux collés nous organisons notre petit déjeuner en chambre pour gagner du temps et permettre une meilleur digestion, mais avec la bouche pâteuse pas évident de se nourrir à cette heure de la nuit. On prépare ensuite notre paquetage et direction la ligne de départ, fixé à 04h00 du matin. Nuit dégagée, température tout à fait correcte nous annonçait une journée radieuse. Un dernier verre de thé et l’on passe ensuite le dernier contrôle de DVA avant de se rendre sur la ligne de départ ou beaucoup de monde avait déjà pris place. 1980 mètres, H moins 5 minutes la tension monte d’un cran et tout le monde s’encourage avant le coup de pistolet libérateur, une fusée éclairante nous libère enfin et c’est parti pour quelques heures d’effort dans un cadre et une ambiance grandiose.
Il s’agit de rallier maintenant le premier poste, qui se trouve 900 mètres plus haut, en moins d’une heure trois quart. La pression est présente et le premier bout de montée est extrêmement raide et glacé par la nuit fraîche, difficile donc de garder les skis bien collés à la pente, il faut se concentrer à faire de petits pas et tirer énormément sur les bras et bâtons, beaucoup de concurrent glisse et tombe dans la masse ce qui a pour effet de provoquer des chutes par ci par là mais nous sommes bien motivés et nous passons cette obstacle. La masse de environ 200 personnes s’étend maintenant dans la nuit et provoque une colonne de lampes frontales digne des guirlandes de Noël, cela vaut le coup d’œil. Au milieu d’autres concurrents nous apercevons maintenant le poste de Riedmatten et nous passons le contrôle en 1h21 le but et donc atteint pour notre patrouille. Il faut maintenant retirer les skis et enlever les peaux pour s’attaquer à la montée du couloir qui a l’air déjà bien bouchonné par les autres patrouilles. C’est parti pour une montée d’environ 20 minutes skis sur sac et a un rythme donné par l’altitude. Le passage et pas mal râpé, peu de neige, il est donc équipé de corde fixe pour se hisser dans les passages caillouteux. Le sommet du couloir (2919m) approche et enfin la descente mythique du couloir de Riedmatten et là, pour celui qui ne l’a jamais fait je peux vous dire qu’à la première vision de la descente on se demande si il ne s’agit pas d’un gag. Une pente extrêmement raide, deux goulets faisant office de passage pour les concurrents, bien glacés et remplis de roches décapées par le passage de millier de personnes. Heureusement le couloir est équipé de deux cordes fixes avec des relais et des nœuds pour l’aide à la descente, let’s go on se lance avec je dois dire cette année une grande aisance à la manière spiderman en rappel dans le passage tant redouté et nous sommes descendus rapidement et sans casses jusqu’au pied du couloir cette fois ci.
Il faut remettre ensuite les skis pour descendre en direction du Pas du Chat (2581m) au début du lac de la Grande Dixence. La descente est longue et le parcours et entièrement bosselé par le passage de tout ce monde, la neige et extrêmement dur et glissante à cette endroit et les traces sont mauvaises, il ne s’agit pas de prendre un ski sans quoi la jambe reste dedans et pas le reste du corps. Ce qui a valu à Marius un péroné cassé !
Enfin la fin de la descente, il faut pousser sur les bâtons pendant environ 15 à 20 minutes pour atteindre le début du lac des Dix et remettre les peaux pour la plupart d’entre nous. Le skating étant réservé aux plus forts et gros bras. Pas facile de faire cela sur 6 kilomètres de faux plats. Le passage de cet endroit à je dois dire été réelement agréable puisque le soleil commençait à se lever sur la vallée et que le temps affiché sur nos chronos était tout à fait génial cette année en comparaison avec l’état dans lequel j’étais il y a deux ans au même endroit.
Une courte montée nous amène maintenant sur le poste de la Barma (2458m), ravitaillement officiel de la course, un bouillon et quelques fruits plus tard c’est reparti pour une longue montée sur le couloir de la Rosablanche ou nous apercevons déjà le long cortège de fourmis s’attaquant au couloir.
Le soleil commence déjà à nous couvrir de sa chaleur et je ressens déjà l’effet de l’altitude sur le cardio qui affiche 85% alors que je n’avance pas très vite, aïe, serrons les dents et en avant mais pas trop vite histoire de garder des cartouches pour la montée suivante, je m’hydrate encore et encore afin de diminuer l’effet. Mon compagnon Alain avance prudemment mais à une vitesse qui juge son état actuel, il a beaucoup moins de dénivelé que nous et au soleil tout commence à devenir pénible et la neige se transforme à vitesse grand V. Un bout la neige colle et un autre bout c’est la soupe, prudence et concentration donc. Ca y est nous arrivons sur un replat et nous commençons à nous rapprocher du couloir qui n’est plus très loin. Il reste un bout d’ascension se faisant en dévers ce qui a comme effet de griller quelques cartouches, les skis glissent tout le temps contre le bas.
Enfin nous arrivons par une chaleur déjà écrasante au pied du couloir de la Rosablanche, il n’est environ que 09h du matin. Le couloir est toujours aussi impressionnant est le fait de se rappeler ce que disait le pasteur hier au soir sur le nombre de marche à gravir ne fait que de mettre un peu plus d’adrénaline. Le couloir est constitué de 1283 marches taillées dans la neige et la glace par les militaires sur une longueur de 300 mètres le tout à double !!! On attaque est je pars gentiment puisque les premiers deux cents mètres sont très raides, il fait chaud, chaud, mais vu les encouragements de militaire posté au milieu du couloir cela me pousse à crocher. Milieu du couloir, déjà 200 mètres de fait et un faux plat pour reprendre le souffle, j’aperçois le dernier tronçon du couloir et au sommet une foule de gens prête à nous encourager, dernier effort et le sommet arrive j’ai des frissons et je verse presque une larme en arrivant au sommet (3160m) tout cela sous les acclamations d’un bon millier de personne accompagnées de cor des Alpes et de cloches. C’est un moment magique que je n’oublierais jamais, malgré le niveau de tout un chacun chaque coureur est un champion a part entière. Mes compagnons me rejoigne quelques minutes plus tard et nous nous dirigeons vers la plateforme pour remettre les skis sous les encouragements des spectateurs, le sommet du couloir de la Rosablanche et une épicerie à ciel ouvert, tout le monde te propose à manger, tu y trouve tout ce que tu veux et le verre de coca et un don du ciel !
C’est reparti pour une descente sur le glacier de la Rosablanche jusqu’au col de Moming avec un bon bout de faux plat montant qui aura raison de mes bras et jambes, mes compagnons également souffriront sur ce tracé. Nous continuons à descendre dans une neige assez verglacée et bosselée et arrivons sur le poste ou il faut remettre les peaux pour attaquer la dernière partie de la course afin de rejoindre le col de la Chaux (2940m). Sur la carte cela ne semble rien du tout mais en général c’est les deux cents derniers mètres les plus difficiles de la PDG. Effectivement et pour mes compagnons j’évite de trop leur parler puisqu’il semble tout deux à la fin du chargeur de cartouche, j’ai encore la fritte et j’en remets un coup afin d’arriver avant eu au sommet et de les aider à enlever leur peaux et fixer leur souliers. En arrivant au sommet à nouveau un public extraordinaire est là pour t’encourager et tu sais qu’à ce moment la course est bientôt finie donc tu a toute l’énergie du monde. Ceci fait nous attaquons la dernière descente qui se compose d’une partie très rapide sur piste et nous nous prenons pour Defago vu la vitesse et la facilité à laquelle nous descendons.
Nous passons la cabane Mont-Fort rapidement et ensuite arrivons au Ruinettes, il reste encore une bonne descente à effectuer et la neige devient de plus en plus lourde nous essayons de garder de bonnes trajectoires et nous faisons très attention dans les virages. Plus que quelques minutes et enfin nous arrivons au pied de la piste dans une neige digne de combat de boue ou nous pouvons enfin enlever les skis et rapidement les fixer sur le sac à dos, il reste encore deux kilomètres à parcourir en courant avec les souliers des skis. Pour celles et ceux qui voudraient trouver un bon moyen de faire sauter les cloques c’est cela qu’il faut faire. A mon énorme satisfaction je n’ai eu aucunes cloques cette année donc on peut en mettre un coup. Et quel plaisir que de courir dans les rues de Verbier en sachant que l’arrivée est proche et que des milliers de gens nous encouragent sur deux kilomètres, plus qu’un centaine de mètre et j’aperçois Céline et les enfants, mes parents, j’attrape Alexis et trouve encore un peu de force pour le porter jusqu’à l’arrivée que nous franchissons en 06h32 minutes très content de la performance avec une larme à l’œil tout de même, je dois dire que le sentiment de franchir cette ligne à de quoi laisser quelques souvenirs à jamais gravé et je remercie mes compagnons de cordée pour cette magnifique épopée. Le verre de coca est bien mérité avec les 12’000 calories grillées.
Pfff, bon maintenant quelques jours de récup et en avant pour la saison de tri… Il fait beau et chaud et les skis sont maintenant à la cave
A +
Joël
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